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UNE BRÈVE HISTOIRE DU LINDY HOP

(CE CONTENU N’A RIEN D’ORIGINAL, IL EST FORTEMENT INSPIRÉ DE LA PAGE SWUNGOVER, CRÉÉE ET ENTRETENUE PAR BOBBY WHITE. NOUS NE SOMMES PAS HISTORIEN·NE·S: LES AFFIRMATIONS QUI SUIVENT DOIVENT DONC ÊTRE PRISES AVEC DES PINCETTES.)

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Willa Mae Ricker et Leon James: session de photos pour le magazine LIFE.

SI TU NE DEVAIS RETENIR QUE QUELQUES ÉLÉMENTS

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  • Le Lindy Hop est une danse d’origine africaine-américaine

  • Le Lindy Hop (sa naissance, son développement, son groove) est étroitement lié au jazz des années 1930-1940, aussi connu comme swing.

  • Le Lindy Hop met au centre de la dynamique de couple l’improvisation des deux partenaires.

  • Le Lindy Hop a été créé dans un contexte de ségrégation et discrimination raciales très aiguës. Ses symboles, son histoire et les émotions qui s’y expriment (la fameuse « joie » du Lindy Hop) sont indissociables de ce contexte.

  • Frankie Manning, Norma Miller, Willa Mae Ricker, Ann Johnson, Al Minns et Leon James sont des pionniers du Lindy Hop.

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Quatre générations de musiciennes de jazz, réunies par l'objectif d' Art Kane, en 1958. Plus d'info sur ce reportage ICI.

DES MUSIQUES ET DES DANSES POPULAIRES D’ORIGINE AFRICAINE-AMÉRICAINE

Early Jazz

Early Jazz

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Comme celle de nombreuses danses sociales populaires, l’histoire du Lindy Hop est indissociable de l’histoire de la musique sur laquelle le Lindy Hop est dansé. Le jazz de la fin des années 20, puis des années 1930, et enfin de la première partie des années 40 (c’est-à-dire le swing) est l’alpha et l’oméga du Lindy Hop. Il lui donne son groove particulier, sa manière de concevoir la relation entre partenaires, ainsi que son énergie, à la fois joyeuse et profonde.

Pendant la première décade du vingtième siècle, les communautés noires et créoles de la Nouvelle-Orléans donnèrent naissance à plusieurs formes musicales qui eurent une grande influence sur la culture populaire américaine (p.ex : le ragtime, et le « hot jazz » naissant). Aussi bien localement qu’au niveau national, ces différentes musiques furent rapidement accompagnées de danses qui s’organisaient autour de leurs énergies particulières.

LE CHARLESTON: 
UNE PREMIÈRE MODE AFRO-AMÉRICAINE IMPARABLE

Ainsi, au beau milieu des années 1920, quand l’« Ère du Jazz » se consolidait, les Etats-Unis furent submergés par une première mode dansante nationale : le Charleston. Il s’agit d’une danse – d’abord individuelle, puis de couple – qui trouve son origine dans la ville du même nom. Ses traits les plus caractéristiques (par exemple : le twist des pieds, issu d’une rotation du col du fémur) rappellent – selon certains chercheurs – des danses d’Afrique Occidental.  Cela n'est nullement surprenant: en-effet, le port de Charleston était un des principaux lieux d’arrivée aux Etats-Unis des personnes réduites en esclavage en provenance, justement, d’Afrique de l’Ouest.

Mais le Charleston ne fut pas la seule danse africaine-américaine à parcourir les Etats-Unis au début du vingtième siècle. Entre les années 1910 et les années 1940, on compte plusieurs dizaines de telles modes dansantes. A la fin des années 1920, par exemple, dans le quartier de Harlem, à New-York, il y avait au moins trois différentes danses de couple que l’on pratiquait dans les clubs : la version harlémite du Charleston, le « Breakaway » et une troisième danse dont on ne sait plus grand-chose, qui répondait au nom de « Collegiate ».

Charleston

Charleston

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BREAKAWAY:
LA NAISSANCE DU LINDY HOP

Avertissement : le MC est en “blackface” (son visage est peint en noir), une pratique très offensive, et malheureusement courante à l’époque. Dans certaines régions, en Europe (dans le sud de l’Espagne et en Hollande), le « blackface » fait malheureusement encore partie de traditions populaires.

En savoir plus, au sujet du "blackface".

Le « Breakaway » incluait bon nombre de mouvements issus du Charleston dansé en couple, ce qui rendait les deux danses parfois difficiles à différencier. Mais le Breakaway contenait également une dynamique caractéristique, à laquelle il devait son nom, et d’importance cruciale pour le développement futur du Lindy Hop : pendant quelques temps musicaux (« beats » en anglais), les danseurs abandonnaient la position fermée – tout en restant connectés par au moins une main – avant de se retrouver à nouveau dans les bras l’un de l’autre. Cette ouverture momentanée de l’espace entre les danseurs constituait une véritable innovation, ainsi qu’une redéfinition de la danse de couple. En particulier, elle créait la possibilité d’une danse de couple dans laquelle les partenaires entretiendraient une relation analogue à celle qui lie les musiciens d’un groupe de jazz : ensemble et interdépendants grâce à l’écoute et aux structures partagées, et libres néanmoins d’exprimer leurs voix dans toutes leurs individualités. Le Lindy Hop c’est cette possibilité qui se réalise.

HARLEM, LE SWING ET LA RÉSISTANCE

Durant la décade des années 1930, Harlem (un quartier new-yorkais, situé au-dessus de Central Park), se convertit en berceau et épicentre d’un son nouveau, d’une nouvelle manifestation du jazz : le swing.

Harlem était un quartier principalement noir, même s’il contenait également de fortes communautés italiennes et hispaniques. Dans les années 1920, la Renaissance de Harlem avait converti ce quartier en une sorte de lieu de pérégrination, de havre d’espoir pour les noirs (américains, mais également au-delà, comme reflète par exemple le début de la biographie de Norma Miller). La Grande Dépression (1929) frappa ce quartier avec une rigueur toute particulière ; mais bien qu’elle imposât des conditions de vie souvent extrêmement dures à ses habitants, elle n’empêcha pas le développement du swing, dont le beat joyeux et entrainant aidait à résister à l’adversité.

Les clubs et théâtres, souvent dotés d’ensembles de jazz en résidence, se multiplièrent dans le quartier de Harlem, qui devint ainsi un centre de gravité culturelle – pour les harlémites, mais aussi pour les habitants du reste de la ville, ainsi que pour les touristes qui visitaient New-York. Le côté grinçant de ce phénomène, ce sont les clubs comme le fameux « Cotton Club » qui exhibent les merveilles issues d’une culture africaine-américaine en pleine ébullition pour une clientèle exclusivement blanche. Mais tous les clubs n’avaient pas ce mode de fonctionnement : Small’s Paradise (un des premiers clubs réputés dont le propriétaire était africain-américain) et, plus tard, le Savoy Ballroom ne ségrégaient pas leur clientèle (au moins pas sur des critères raciaux : il semblerait que les prix du Small’s Paradise était assez prohibitifs pour un salaire harlémite moyen). C’est au sein de ce Harlem bouillonnant d’injustice, de luttes, de créativité et de résilience que le Lindy Hop vit le jour. C’est depuis ce Harlem épicentre culturel de New-York et des Etats-Unis qu’il se convertit en phénomène de mode et se popularisa dans tout le pays, puis dans le monde entier.

LE SAVOY BALLROOM: BERCEAU DU SWING

S’il est un club qui, plus qu’aucun autre, est associé à la naissance et au développement du Lindy Hop et du Swing, c’est bien le Savoy Ballroom. Situé au croisement entre la 141ème Rue et la 7ème Avenue, c’était un des plus grands clubs de la zone : il occupait un bloc de bâtiments entier. Un grand signe au-dessus de l’entrée indiquait qu’on avait affaire à la maison des pieds joyeux (« Home of the Happy Feet »). Ouvert en 1926, le Savoy Ballroom fut l’un des premiers salons de danse intégré (i.e. qui ne pratiquait pas la ségrégation) . Il devint rapidement le nec-plus-ultra de la vie nocturne harlémite. Un lieu de création ou de consécration des nouvelles tendances de la musique et de la danse afro-américaines.

C’est ainsi, depuis la scène du Savoy, qu’un batteur de très petite stature, souffrant d’une tuberculose osseuse qui le rendit bossu et lui enleva la vie avant même qu’il n’atteigne les 40 ans, se consacra comme le premier « Roi du Swing ». Son nom n’était autre que Chick Webb – percussionniste de génie, animateur à l’énergie débordante, et l’un des pères des sections rythmiques swinguantes. Chick Webb fut le leader du groupe de musique résident au Savoy Ballroom dès 1931 et presque jusqu’à sa mort, en 1939. Durant ses 8 ans d’activité au Savoy Ballroom, il remporta un nombre incalculable de « Battles of the Bands », découvrit la jeune Ella Fitzgerald et nourrit la créativité des premières générations de Lindy Hoppers.

LES PREMIER·E·S LINDY HOPPERS

Des quelques noms que l’on associe à la première génération de Lindy Hoppers (« Twisted Mouth » George, Big Bea, Mattie Purnell et « Shorty » George), c’est celui de Shorty George qui occupe le plus de place. Selon plusieurs sources, il a grandement contribué à la création et au développement du Lindy Hop. C’est aussi probablement la première personne qui forma une troupe de Lindy Hop dans le but de faire des exhibitions et spectacles. De plus, sa troupe est le premier groupe de Lindy Hoppers qui apparut dans un film. Enfin, c’est Shorty George qui aurait baptisé le Lindy. Lors d’un marathon dansant, l’histoire raconte, un journaliste se serait approché de Shorty George, s’enquérant du nom de la danse qu’il exécutait si brillamment, avec sa partenaire Mattie Purnell. Shorty, inspiré par les gros titres d’une gazette qui, en référence au vol transatlantique de Charles Lindberg, titrait « Lindy hops over the Atlantic », aurait alors répondu qu’ils dansaient le « Lindy Hop ».

SECONDE GÉNÉRATION: WHITEY'S LINDY HOPPERS

Whitey's Lindy Hoppers

Whitey's Lindy Hoppers

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Mais c’est bel et bien la deuxième grande génération de Lindy Hoppers, organisée autour d’un dénommé Herbert « Whitey » White qui va donner à cette danse ses lettres de noblesse, et en faire un phénomène de portée nationale et bientôt internationale. Les acteurs de cette deuxième génération de Lindy Hoppers – qui fleurit et s’impose dès la seconde moitié des années 1930 - sont un groupe d’adolescents ou jeunes adultes africains-américains, qui débordent de talent, d’enthousiasme et d’énergie, et qui – sous le nom de « Whitey’s Lindy Hoppers » - vont remporter de prestigieuses compétitions (le fameux « Harvest Moon Ball »), envahir les théâtres Etats-Uniens, faire des tournées dans le monde entier, et apparaître dans de nombreux films. Ce sont, entre autres, Willa Mae Ricker, Leon James, Al Minns, Ann Johnson, Norma Miller et l’inévitable Frankie Manning. Si tu ne les as pas encore vus danser, regarde-les dans « Hellzapoppin’ » , « A Day At The Races » et « Keep Punchin’ ».

LES "CLASSIC ROUTINES"

Les « Whitey’s Lindy Hoppers » transformèrent profondément le Lindy Hop, et lui donnèrent la forme qui en fera une danse de spectacle incroyablement efficace. Ils mirent en place les premières chorégraphies de groupe où les danseurs exécutent des mouvements à l’unisson, soulignant ainsi certains éléments de la musique. Ils créèrent les « Air-Steps », ces mouvements acrobatiques où l’un.e des deux partenaires décolle, exécute une figure et atterrit en rythme. Et ils écrivirent les chorégraphies – aujourd’hui souvent décrites comme « Classic Routines » - autour desquelles la communauté moderne de Lindy Hoppers se réunit (le Shim Sham, le Tranky Doo, le Big Apple, et la California Routine).

POPULARISATION ET MISE A L'ECART DES CREATEUR·ICE·S AFRO-AMÉRICAIN·E·S

Le succès des « Whitey’s Lindy Hoppers » contribua à faire du Lindy Hop un véritable phénomène de masse. Tout comme le swing devint, durant la deuxième moitié des années 1930, la musique populaire des Etats-Unis, le Lindy Hop en devint la danse. Ainsi, c’est bel et bien le Lindy Hop que les soldats américains emmenèrent avec eux en Europe, lors de la Seconde Guerre mondiale.

Lorsqu’on parle de la popularisation du Lindy Hop (et du Swing) à la fin des années 1930, il est important de souligner que ce mouvement de popularisation – aussi bien dans la musique que dans la danse – s’accompagna d’une mise à l’écart des créateurs africains-américains, qui furent remplacés par des musiciens blancs (Benny Goodman succède à Chick Webb comme le « Roi du Swing ») et des danseurs blancs (aux scènes de danses des « Whitey’s Lindy Hoppers », succèdent les scènes de danse de Dean Collins, Jewel McGowan et Jean Veloz). Ainsi, l’histoire se répéta une fois de plus, et les (principaux) bénéfices économiques et honorifiques de produits culturels africains-américains terminèrent entre les mains de personnes blanches.

APRÈS LA GUERRE

Pour bien des raisons, mais en grande partie simplement en réponse à l’évolution des goûts musicaux, le Lindy Hop cessa d’être la danse de mode après la Seconde Guerre mondiale. Il n’y a cependant aucun doute que bien des danses qui s’imposèrent par la suite (par exemple le Rock & Roll), partagent plus qu’un air de ressemblance (un vrai lien de parenté) avec le Lindy Hop.

Par ailleurs, bien qu’il n’eût plus jamais la même popularité, le Lindy Hop ne disparut pas. Il était encore pratiqué et partagé dans certaines communautés africaines-américaines. Et le lien de parenté entre les danses jazz et certaines danses africaines-américaines plus récentes (p. exemple le Hip Hop) est si évident, qu’il est parfois tentant de penser que Lindy Hop, Jazz, Funk, Hip Hop, sont en fait différentes manifestations d’un unique continuum - d’une esthétique et une manière de penser la relation entre la danse, la musique, l’individu et le collectif propre à la communauté africaine-américaine – qui s’incarne sous des guises changeantes en fonction du groove de l’époque.

DES ANNÉES 1980 A AUJOURD'HUI

Jazz Dance -  aujourd'hui

Jazz Dance - aujourd'hui

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A partir des années 1980, différentes organisations et personnes (Mama Lou Parks à New York, The Jiving Lindy Hoppers en Grande Bretagne, et ceux qui deviendront les Rhythm Hot Shots en Suède) investissent argent, temps et énergie pour repopulariser le Lindy Hop. Leurs efforts amènent certains des pionniers (en particulier Frankie Manning, mais aussi Al Minns et Norma Miller, par exemple) à voyager autour du globe et à partager le Lindy Hop avec des audiences de biens des horizons.

Ce mouvement est parfois décrit comme « revival », un terme qui a été vivement critiqué récemment puisque, selon ses détracteurs, il suggère que le Lindy Hop aurait été abandonné par la communauté africaine-américaine et sauvé par des danseurs (majoritairement blancs), qui l’auraient redécouvert.

Aujourd’hui, le Lindy Hop est une danse pratiquée sur tous les continents. C’est une danse vivante, en perpétuelle évolution ; c’est une danse chargée d’histoire ; c’est une danse libératrice, joyeuse mais pas innocente ; et c’est ainsi que nous souhaitons vous la transmettre.

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